mercredi 30 mars 2016

La chronique de l'Expat


Les cousins



Notre Expat nous parle aujourd'hui de sa vie à Montréal, de la façon dont nous sommes perçus, en tant que Français, du manque de connaissance de ce qu'est la France pour la plupart des Canadiens (Québécois) et aussi de quelques particularités linguistiques…
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Dans mon pays d’adoption, la France, ce sont les cousins (quand on est de bonne humeur) ou les maudits françââis (quand on est de mauvaise humeur…) et nous avons un stock inépuisable de blagues sur les français, tout autant que les français en ont sur les belges!

Quand je dois expliquer ou se situe Donzy, ce n’est pas très facile : en général, si mon interlocuteur semble connaître un peu le vin, je dis ‘’à côté de Sancerre’’. Bon, d’accord, Sancerre, il connaît, il sait que c’est en Europe. Mais ou exactement?? La Loire, à part les châteaux, c’est un concept abstrait. Faut pas trop en demander quand même!

Ou alors, je fais du quadrillage géographique : 200 km plein sud de Paris. Là, généralement j’ai droit à ‘‘vers Lyon?? ‘’ Je suis devenu un peu prof de géo à expliquer la Bourgogne, le Val de Loire, le Morvan…

Pas évident non plus d’expliquer que ma ville natale a été fondée il y a 1600 ans, plus ou moins…ici, la notion patrimoniale englobe tout ce qui a plus de 100 ans (et il n’y a rien de plus de 500 ans!) Quand je raconte Renaud de Chatillon* Mahaut de Courtenay, ou Hervé IV, c’est difficile pour mes interlocuteurs de concevoir une petite histoire locale si fertile et si établie. Et si j’ajoute que j’ai habité à Donzy dans une maison du legs Frappier de St Martin, j’aurai droit à une moue d’incrédulité!!!

C’est vrai que ce côté passé historique me manque un peu. Mais par contre certains mots de la langue française ont toujours cours icitte, alors qu’ils ont disparu en France; la brunante en est un bel exemple (le crépuscule). Quand on travaille avec les mots comme il m’arrive souvent, il y a une certaine émotion à redécouvrir ces fossiles langagiers. Ça va de A, comme dans abrier (provenance Normandie) à Z, comme zigonner (même signification que patenter!), en passant par champlure (vient du vieux normand chantepleure, petit robinet) Toute une parlure locale! Sans accent pointu!

Exercice (clin d’œil à Mme Landry et/ou Mr Lacaze) : Traduisez en français contemporain la phrase suivante :
Ben magané, après ma brosse hier, faut que je rapaille ma minoune au plus sacrant pour aller au dépanneur chercher de la pâte à dents !**

Bon, nous avons aussi un chien de garde du français (l’Office de la Langue Française) qui parfois pousse le bouchon un peu loin; récemment un restaurateur s’est vu verbaliser pour avoir indiqué WC, et non toilettes. Cela sans compter les traductions ratées comme un gaminet (Tshirt) ; un saucipain (hot dog) La seconde proposition n’est pas vraiment meilleure : Un chien-chaud!

L’excès en tout est un défaut!

Mais quand je suis arrivé, en 1975, le plus dur a été la bouffe. Oui, j’utilise ce mot à dessein : Camembert en boîte de conserve (provenance Allemagne), pain industriel style pain de mie en tranches uniquement, viande coupée à la scie, et comme boisson nationale une mauvaise bière (ou un cidre encore pire). J’étais vraiment dans le tiers-monde gastronomique, après avoir apprécié les écrevisses de la Talvane, les flans de Bigoisse, le pain de Mr Gasecki, le saupiquet du Grand Monarque, et le saucisson à l’ail de Mr Cholé... 

En 40 ans, tout s’est transformé (au prix d’une guéguerre entre les partisans du tout-pasteurisé vs du thermisé vs lait cru) et il m’est déjà arrivé d’offrir des fromages locaux (on en produit maintenant officiellement 340 sortes, dont certains bleus somptueux) à des amis français à qui je rendais visite.

Toujours pas de croquets, hélas. Tiens, faut que j’y pense, pour mon prochain passage : faire provision…

*Fils d’Hervé II, mort décapité par Saladin en personne en 1187 en Palestine. Premier grand voyageur donzyais répertorié, mais les voyages étaient plutôt dangereux..!


**Très amoché après ma cuite d’hier, je dois réparer ma guimbarde au plus vite pour aller à l’épicerie chercher du dentifrice!

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