vendredi 7 octobre 2016

UNE DÉCOUVERTE MAJEURE


Archives de la Comédie Française du XVIIe siècle


On a retrouvé récemment dans une malle oubliée au fond d’une des caves où sont entassées d’anciennes archives de la Comédie Française, un texte inédit de Corneille. Il s’agit d’une version antérieure à la seule version connue à ce jour de la pièce : «Cinna ou la clémence d’Auguste.»(Jouée pour la première fois en 1641).

Dans cette version de 1632, Corneille avait imaginé que le poids de sa haine et la violence qui l’habitaient étaient tels qu’Auguste ne pourrait en aucun cas atteindre à la grandeur que nous lui connaissons dans la pièce actuellement jouée.

Nous avons pu nous procurer la fin de la pièce telle qu’elle avait été écrite initialement. 

L’Échauguette est fière d’être en mesure de vous la présenter à la suite de la représentation exceptionnelle donnée récemment à Donzy, par une troupe composée de comédiens amateurs remarquables. 

Cet événement culturel a eu lieu à l’occasion du Forum des Associations qui s’est tenu le 10 septembre 2016. 

La terrasse, à l’arrière de la salle des fêtes, transformée en scène de théâtre pour la circonstance, fournissait un bel espace pour que les comédiens puissent pleinement exprimer le naufrage d’Auguste dans cette folie qui l’emportait irrémédiablement. 

Des sièges avaient été installés sur le terrain au bas de cette scène et quelques centaines de spectateurs y avaient pris place, impatient de voir cette version inédite du chef d’œuvre de notre bon Corneille

Avertissement : le texte qui suit n’est qu’un amusement qui ne vise à rien d’autre qu’à faire sourire. Si d’aventure, quelqu’un s’imaginait trouver une ressemblance avec un personnage existant ou ayant existé, ce ne saurait être que pure coïncidence à propos de laquelle nous déclinerions toute responsabilité.
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CINNA OU LA CLÉMENCE D’AUGUSTE
1632)

Quelques personnages utiles à notre propos :

Auguste (Octave-César), Empereur de Rome.
Euphorbe, affranchi de Maxime, ancien chef de la conspiration contre Auguste.
Cinna, fils d'une fille de Pompée, chef de la conjuration contre Auguste.

Dans ce dernier acte (acte 5), Auguste découvre que tous ses plus chers amis faisaient partie de la conspiration pour l’abattre. Il n’en peut plus de toute cette trahison qu’il ne comprend d’ailleurs pas.
Dans cette dernière scène, il se confie à Euphorbe avant d’être emporté par la folie, seule manière de fuir toutes les horreurs qu’il a suscitées autour de lui.
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Auguste marche de long en large sur la scène ; il y a un banc de pierre où il s’assied par moment et se relève aussitôt. Il est très agité. Il parle davantage pour lui-même que pour Euphorbe.
Euphorbe reste debout, à quelques pas de lui, dans une attitude respectueuse.


Qui pardonne aisément invite à l’offense 
Punissons l’assassin, proscrivons les complices.
Mais quoi ? Toujours du sang, et toujours des supplices !
Ma cruauté se lasse, et ne peut s’arrêter.
Je veux me faire craindre, et ne fais qu’irriter

Donzy a pour ma ruine une hydre trop fertile, 
une tête coupée en fait renaître mille,
et le sang répandu de mille conjurés
rend mes jours plus maudits, et non plus assurés.

Ô Dieux, libérez-moi de cette haine qui me ronge 
Et faites qu’en un instant tout cela ne soit qu’un songe.
Mais quoi, ma vue s’obscurcit, je défaille :
je chancelle devant ces spectres qui m’assaillent.

Sont-ce les âmes de toutes ces victimes innocentes, 
mais non, tout à fait coupables, que j’ai occises ?
Comment ai-je pu croire qu’elles étaient innocentes…
Mais je les devais occire, dans ma fureur exquise !
Elles ont osé se dresser face à Auguste
et mettre en doute sa bonté et sa grandeur juste.

Et bien oui, je les hais encore, ces victimes expiatoires, 
sacrifiées sur l’autel insatiable de ma gloire ;
mais je hais surtout cette monstrueuse Échauguette
et son horrible Collégiale qui me guette.

Et dois-je aussi écouter les murmures futiles 
de tous ces conseillers serviles et inutiles
qui quémandent sans cesse caresses et oboles ?
Ils ne me servent de rien, avec leurs fariboles
leur destinée sera d’être à leur tour occis
car ils ne le savent pas, mais je les hais aussi.

Ô, Dieux, qui avaient refusé de m’apaiser 
et m’avez abandonné, soyez donc maudits.
Seule ma bien-aimée folie pourra me griser.
Elle m’accueille dans son sein, je suis aussi maudit.
Je la sens, je l’appelle, elle vient avec tous ces corps
écartelés qui, tous, dansent dans ma tête
et ces cadavres pantelants qui me font fête.
Oh folie, libère-moi de cette Échauguette,
Et de son affreuse Collégiale qui me guette,
Alléluia, je suis heureux, je vais dormir
sur le lit sanglant de mes rêves magnifiques
dont je conserverai toutes les traces mnésiques
dont mes effroyables ennemis vont frémir !


Il s’effondre sur le banc de pierre avec des mouvements spasmodiques en poussant des borborygmes informes.
On entend au loin la sirène du SAMU

LE RIDEAU TOMBE
Le public, debout, acclame les comédiens.

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